Les Montagnards Laurentiens (1931-1962), par P.-H. Émond

Vol. 9, no. 3, Printemps 2006

par FAVREAU Éric

Les Montagnards Laurentiens (1931-1962).
Par Paul-Henri Émond, Édition Améca, collection Histoire de la radio, 2004, 418 page

Le nom Les Montagnards Laurentiens vous dit quelque chose ? Pour plusieurs, ce nom évoque une période privilégiée dans l’histoire de la radio de la ville de Québec, où pendant plus de trente ans (1931-1962) les auditeurs ont pu se divertir semaines après semaines de cette émission où la musique traditionnelle était à l’honneur. Diffusée en direct, cette émission prit, au fil des ans, une ampleur et une popularité remarquable et bien des personnes qui ont eu le loisir de l’entendre, en garde un souvenir respectueux et admiratif. Dans l’histoire de la radio et de celle du poste CHRC, l’émission fut par ailleurs un phénomène exceptionnel. Les Montagnards Laurentiens furent à la fois un groupe de musique traditionnelle et une émission radiophonique. Au cours de ses longues années d’existence la formation connue plusieurs changements passant de quatre membres à une dizaine au cours de leurs dernières années.

Les Montagnards Laurentiens ont été pour plusieurs musiciens traditionnels une source d’inspiration et aura joué un rôle important dans la diffusion et la transmission de ce genre de musique. Malgré sa longue existence, le groupe ne fera jamais d’enregistrement commercial. Leur succès reposait sur l’émission qui pouvait se rapprocher des numéros de vaudeville présenté à l’époque. Diversité, variété, musiciens aguerris, sketches radiophoniques, blagues, présentateurs hors pair, invités de renommé, tous ont contribués à maintenir cette célébrité. Leurs présences scéniques en dehors des studios dans différents évènements d’importance et leurs nombreuses représentations à différents endroits dans la province ont permis également d’entretenir leur lien avec le public. L’émission est intimement liée au développement de la station radio qui malgré tout demeurait un phénomène assez récent dans la capitale. Ce facteur d’innovation technologique a contribué également à créer un engouement, non seulement envers les Montagnards, mais envers l’ensemble des programmes diffusés, car malgré tout, la radio représentait une ouverture sur la diversité, sur la connaissance et sur le monde.
Si une partie du répertoire et du style des Montagnards Laurentiens continuent d’exister par l’entremise de plusieurs musiciens traditionnels, l’histoire du groupe est loin d’avoir été exposée et racontée, bien qu’il existe encore des personnes ayants joué au sein de cette formation.

Soucieux de vouloir préserver cette mémoire des faits et l’histoire des Montagnards Laurentiens, l’auteur, Paul-Henri Émond, nous offre un livre dédié à ce groupe. Il s’agit ici d’un livre qui raconte les trente ans d’existence des Montagnards, et non pas d’un livre de partition, qui n’en comporte d’ailleurs aucune. L’auteur a mené une enquête approfondie et selon ses dires : « La cueillette d’information s’étend sur cinq ans, cinquante heures d’interviews avec les témoins, autant de recherches dans les journaux, revues et microfilms de l’époque. Une recherche de photographies fort laborieuse, des entrevues à la radio, sans compter des démarches parfois inhabituelles ! ...En effet, j’ai parcouru des cimetières pour authentifier des dates. » Cette passion envers les Montagnards n’est certainement pas étranger au fait qu’il est le fils d’Henri Émond un des cofondateurs du groupe.

Le livre, de 418 pages, est divisé en quatre grandes parties qui nous ramènent à des périodes précises (1931-38, 1939-44, 1946-54, 1955-62). Chacun de ses grands chapitres reprend donc, de façon brève, le parcours chronologique du groupe et présente principalement chaque personne ayant gravité autour de l’émission. Dans ce sens, nous avons droit aux biographies des musiciens et des chanteurs, mais également à celles des ingénieurs de contrôle, techniciens, producteurs, réalisateurs, directeurs de station, artistes invités, comédiens occasionnels, diseurs(ses), annonceurs, etc. L’ouvrage de Émond ressemble beaucoup dans sa structure et sa présentation à celui de Gabriel Labbé (Musiciens traditionnels du Québec, paru en 1995 ).

L’auteur va au-delà du sujet mentionné et raconte tout à la fois l’histoire du poste CHRC et les personnes qui y gravitaient. Le livre est aussi abondamment illustré de photographies noir et blanc de chaque personne présentée ainsi que de plusieurs photographies des Montagnards prisent à différentes époques. Photographies qui sont d’ailleurs dans certain cas tout à fait magnifique, mais qui sont en partie gâchées de par la piètre qualité de l’impression.

L’auteur a davantage opté pour une présentation individualiste des membres du groupe et personnalités gravitant autour de la formation au fil des ans que d’une présentation linéaire du groupe dans sa globalité. À trop vouloir mettre en évidence la petite histoire de chacun, l’information s’en trouve malheureusement diluée, mais aussi inégale faute d’avoir trouvé quelque chose à dire sur telle ou telle personne. En ce sens, certaines personnes ont droit à seize pages de biographie, tandis que d’autres n’ont droit qu’à deux pages. Il est évident que dans certains cas il demeure difficile de trouver des informations faute de documentation.

Ajoutons à ceci que certaines informations contenues dans certaines notes biographiques son plus ou moins pertinentes au sujet. Il est évident que l’auteur a voulu faire connaître les acteurs bien au-delà de leur rôle au sein de la formation musicale, dans certains cas cela vient alourdir la lecture. En fait, pour connaître et prendre connaissance de l’évolution de cette formation, il faut, entre autres, chercher l’information à travers les présentations de chaque personne, ce qui donne l’impression d’un manque de synthèse. Certaines parties du livre sont maladroitement écrites, notamment la partie qui concerne l’histoire de la musique traditionnelle ainsi que la section « la paternité des Montagnards Laurentiens  ». Autre point faible, il n’y a pratiquement aucune allusion à la musique que jouait les Montagnards Laurentiens. Pourtant le répertoire véhiculé par ceux-ci était d’une grande richesse, puisé au cœur même des répertoires individuels de ses membres, qui étaient en majorité des musiciens traditionnels de la grande région de Québec. Le répertoire diffusé était le reflet même d’une musique de danse souvent associée au quadrille, genre par excellence de cette région.

Idéalement, il aurait été fort utile de joindre à ce livre un DC qui aurait présenté des extraits d’émissions des Montagnards Laurentiens permettant ainsi de faire entendre ce son si particulier de cette formation. Il existe encore des personnes qui ont conservées des émissions entières des Montagnards Laurentiens et nous sommes tout à fait persuadé que monsieur Émond en possède également. Peut-être s’agit-il d’un autre projet qui viendrait merveilleusement enrichir son livre.

Malgré ces points faibles, le lecteur pourra se rendre compte que le livre est une véritable mine d’informations en ce qui concerne le vécu de la musique traditionnelle dans la grande région de Québec. Le livre de Émond représente un travail de longue haleine et de passion. Nous ne pouvons que le remercier d’avoir mis à la disposition du public ses nombreuses découvertes qui révèlent une partie de l’histoire musicale et radiophonique de la région de Québec par le biais des Montagnards Laurentiens.

Les Montagnards Laurentiens 1931-1962, par Paul-Henri Émond, Édition Améca, collection Histoire de la radio, 2004, 418 pages.

Le livre est en vente, entre autres, à l’AQLF au prix de $30.00

Membres fondateurs :

Paul Drolet : violon (1931-1962)

Henri Émond : violon, égoïne, comédie (1931-1937)

Bill Harris : guitare, harmonica, chant (1931-1951)

Charles-Henri Harris : violon, banjo (1931-1941)

Le groupe a aussi compté dans ses rangs :

Maurice Beaupré : chant, comédie (1934-1957)

Jean-Paul Beaulieu : clarinette, saxophone (1939-1951)

Lévis Beaulieu : accordéon (1945-1962)

Edmond Bélanger : piano, accordéon-piano (1937-1947)

Rodolphe Bélanger : violon (1939- ?)

Jos Brousseau : piano, égoïne, xylophone (1940-1952)

Gérard Dion : piano (?)

Roland Dorval : violon (1939-1949)

Jean-Louis Gagnon : contrebasse (?-1942)

Philippe Gagnon : contrebasse (?)

Marcel Grondin : accordéon (1947-1948)

Aimé Hamel : violon (1946- ?)

Jean-Yves Hamel : piano (1955-1962)

Paul-Émile Jobin : violon (1939-1944)

Gérard Lajoie : accordéon (1939-1945 ?)

Roland Latulippe : guitare (?)

Lucien Leclerc : guitare, chant (1939-1944)

Paul Légaré : chant (1939- ?)

Guy Lepage : chant (1946-1947)

Gérard Lessard : violon (1938-1940)

Jean-Paul Malouin : contrebasse (1942-1948)

Viateur Ouellet : violon (1938-1953)

Janine Émond-Prou : chant (1947-1952)

Paul-Émile Robin : violon (1939-1954)

Adélard Thiboutot : violon (1948-1952)

Maurice Turcotte : piano (1939-1942)

Membres occasionnels :

Gaudias Bédard : accordéon

Jos Bouchard : violon

Gérard Brochu : guitare, chant

Jean-Marie Bruneau : comédie

Théodore Duguay : accordéon

Roméo Harris : accordéon

Marcel Lachance : accordéon

Irène Lamontagne : piano

Jos Paquet : violon

Salomon Paquet : banjo

Maurice Perron : chant, comédie

Gilbert Trudel : guitare, mandoline

Marcel Trudel : mandoline

Yamel : magicien

(tiré du site : http://www.qim.com/artistes/biograp..., qui comporte un aticle sur le livre de P-H Émond)



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